Le skillsourcing, qu’est-ce que c’est?

Certains parlent de co-création, d’autres de crowdsourcing (littéralement « tirer des ressources de la foule »), pour ma part et quitte à créer un néologisme (c’est la mode!), je parlerais plutôt de « skillsourcing », terme qu’on pourrait traduire par « rechercher des fournisseurs de talent » et qui me semble plus adapté au phénomène que je vais tenter de vous décrire.

Qu’est-ce donc que le skillsourcing? C’est en quelque sorte un nouveau modèle d’entreprise qui s’appuie largement sur le WEB et qui se base sur l’hypothèse que beaucoup de gens ont des idées, du talent ou de la créativité dans différents domaines mais pas assez de temps, d’argent ou d’ambition pour les développer. Partant de là, ces entreprises proposent de collecter ces idées, de sélectionner les meilleures et in fine, de les commercialiser. Vous êtes un amateur éclairé ou alors un pro qui souhaite sortir un peu du cadre un peu trop contraint de son travail habituel, vous avez une idée, ils s’occupent de l’améliorer, de la définir en détail, de la produire puis de la distribuer. En contrepartie, ils vous rémunèrent en nature (des bons d’achats ou des cadeaux, n’allez pas imaginer autre chose bandes de petits cochons!) ou en espèces sonnantes et trébuchantes. Ne vous emballez pas, pour le moment, il n’y a pas de quoi en vivre! Alors concrètement ça donne quoi? Des exemples:

  • vous êtes développeur informatique? vous proposez vos idées de nouveaux logiciels ou de site WEB à Cambrian House ou MyDreamApp
  • vous êtes ingénieur, vous avez imaginé un produit électronique innovant? vous le soumettez à Crowdspirit
  • vous êtes doué en dessin ou graphiste? vous envoyez vos créations à LookZippy ou à LaFraise qui en feront de bien beaux T-shirt ou à Naked and Angry qui les transformera en cravattes, en papier peints ou en chaussettes
  • vous faites de belles photos? vous les confiez à iStockPhoto ou Fotolia, deux banques d’images en ligne qui s’occuperont de les vendre, ou à JPG magazine (dont j’ai déjà parlé ici) qui les publiera
  • vous avez imaginé un spot publicitaire? vous vous tournez vers l’agence publicitaire en ligne ViTrue qui s’occupera de le vendre à une marque
  • vous réalisez des petits reportages ou des films? proposez les à Current.tv qui ne diffuse que des émissions réalisées par des non-profressionnels

Attention tout de même, vous ne gagnerez pas à tous les coups. C’est même plutôt le contraire, pour assurer leur réussite et leur pérennité, ces entreprises opèrent une sélection drastique, soit grâce à un vote des visiteurs sur leur site (ce qui permet d’être en phase avec les attentes des clients potentiels), soit elles-même (elles ont tout de même une certaine expertise dans le domaine concerné).

Au final, quel est l’intérêt de ce modèle?

  • d’abord, ça permet de monter une entreprise avec un effectif minimal. Patrice Cassard, le créateur de LaFraise a démarré seul son entreprise de T-shirts sans avoir besoin de payer un graphiste pour créer les visuels de T-shirts. Pour l’anecdote, il a revendu son entreprise deux ans après l’avoir créé pour environ 2 millions d’euros. Les créateurs reçoivent maintenant 1000€ si leur visuel est retenu pour l’édition de 500 T-shirts.
  • ce concept permet de fédérer autour du site WEB de l’entreprise une communauté de créatifs qui proposeront des idées, de juges qui participeront au processus de sélection et de simples spectateurs qui suivront la progression des idées et de l’entreprise. Dans tous les cas, ce sont autant de clients potentiels pour les futurs produits. En plus, cette communauté assure une meilleure adéquation entre les attentes et les produits et un retour d’information en temps réel des acheteurs/utilisateurs. C’est en ce sens que l’avènement d’Internet et du WEB 2.0 en particulier a évidemment été un élément clé pour l’émergence de ce modèle, la toile mondiale permet de toucher un nombre beaucoup plus large de créateurs.
  • enfin, le principe du concours d’idées permet de créer une émulation entre les participants, d’obtenir une certaine variété dans les idées proposées et en définitive, d’aboutir à de meilleures idées que si on faisait appel à une seule personne.

Pourquoi je préfère le terme « skillsourcing »?

  • « crowdsourcing » désigne plutôt selon moi l’utilisation de la foule, c’est à dire d’individus sans compétences particulières pour effectuer des taches accessibles à priori à n’importe qui. C’est le cas par exemple du site Amazon Mechanical Turk
  • « co-création » a un sens plus large puisqu’il désigne la création à plusieurs, sans cibler forcément ce modèle d’entreprise. Le skillsourcing est de la co-création mais l’inverse n’est pas vrai.

En conclusion, quel est l’avenir du « skillsourcing »? A coup sûr, on va voir le phénomène se développer encore et s’étendre à de nouveaux domaines. Je verrais bien par exemple un site pour proposer des idées de scénarios de films. Cependant le concept n’est pas extensible à l’infini, il doit cibler des produits suffisamment grand-public pour fédérer un nombre important de créatifs et générer des volumes de ventes importants. Il doit aussi prendre garde à conserver ce côté « artisanal » qui le rend si sympathique et qui fait à mon avis son succés. Impossible donc de voir une World Company basée sur le « skillsourcing ». Pour les créatifs de tous poils jusque là isolés, voilà en tout cas de belles occasions de voir leurs rêves devenir réalité.

Jan15

Une réponsee to “Le skillsourcing, qu’est-ce que c’est?”

  1. Ouais…. Skillsourcing, c’est pas mal aussi 😉
    Joli article

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